Tiavina et Landy Niaritsiry ont pris leurs fonctions le 1er septembre. Pour cet ingénieur en robotique et cette infirmière fraîchement diplômée, Malgaches naturalisés, c’est un tournant supplémentaire dans des parcours de vie atypiques

Avec l’arrivée des Niaritsiry, un quatrième couple successif va présider aux destinées du foyer Agapê, à L’Orient. Cette configuration est souhaitée et remonte à l’origine de cette unité d’accueil il y a maintenant trente-cinq* ans. A l’époque, la maison en bordure de la rue Chez-Villard hébergeait des retraités en difficulté; sous régime de fondation depuis 2009, c’est aujourd’hui une structure professionnalisée employant vingt-trois collaborateurs (direction y compris), pour seize équivalents temps plein.
Les responsables sortants, le couple Pierre-Alain et Marylise Isely, passent toutefois le témoin dans un contexte délicat: l’Etat met la barre toujours plus haut à de telles structures d’accueil médico-social, en termes de normes, de règles et de compétences requises, avec pour objectif assumé de condamner les plus petites d’entre elles.
Changement professionnel radical
À ce défi s’ajoute celui d’une reconversion professionnelle pour le nouveau directeur Tiavina Niaritsiry, après treize ans passés dans l’horlogerie – le natif d’Antananarivo, capitale de Madagascar, parle même d’un changement radical. Il amène à son nouvel employeur un MBA (maîtrise en administration des affaires) et la confiance en l’avenir. Deux atouts auxquels s’ajoute la jeunesse (il a quarante-deux ans, son épouse à peine moins). «J’abandonne les métiers industriels pour le monde de la santé, c’est un vrai projet de cœur. Il m’a fallu un an de réflexion, mais j’aborde cette nouvelle étape avec enthousiasme.» Pour la petite histoire, c’est son épouse Landy qui a postulé la première à titre personnel puis à nouveau en 2018, en duo, au moment où l’Agapê cherchait à repourvoir sa direction pour cause de retraite prochaine. Landy Niaritsiry vient de quitter, pour sa part, la fondation de l’Orme, en milieu psycho-gériatrique. Géographe de formation, opératrice quelques années dans l’horlogerie combière, sa formation en soins infirmiers, un rêve d’enfance, est récente.
Complémentarité dans le cadre du Pôle Santé
L’inexpérience et le contexte plutôt précaire n’empêchent pas les nouveaux responsables de l’Agapê de nourrir des perspectives d’avenir. «Notre atout, c’est le côté “famille”, comme une interface pour les résidents envers leur entourage. Je nous vois développer encore cet aspect de la convivialité, de l’élargir, de permettre par exemple aux proches et familles de résidents de venir manger de temps à autres avec eux. Le nom Agapê [“amour” ndlr] dit beaucoup de choses!», déclare Tiavina Niaritsiry.
Un nouvel EMS devrait voir le jour à La Vallée d’ici 2025, c’est même un des gros morceaux du projet Pôle Santé. Doté de soixante lits, celui-ci sera trois fois plus gros que l’Agapê et en mains publiques. Mais les Niaritsiry ne craignent pas un phénomène de concurrence. «Il n’y aura pas de trop de ces deux structures à La Vallée. Les responsables du Pôle Santé nous ont assuré qu’ils comptent sur nous!». L’augmentation démographique des personnes âgées dépendantes et la hausse des besoins en matière d’hébergement psycho-
médico-social vont bien dans ce sens.
Beaux exemples d’intégration
«Rien de ce que nous avons planifié ne s’est déroulé comme prévu et les choix n’étaient pas les nôtres. A chaque carrefour, parfois en proie au doute, à l’incompréhension, des personnes bienveillantes nous ont orientés et accompagnés. Avec le recul, chaque étape nous a amené du bonheur», témoignent les Niaritsiry, tous deux arrivés en Suisse pour leurs études: Landy pour une licence en géographie et elle a finalement tâté du droit à Lausanne, sans aboutir. Tiavina, lui, a suivi un lycée électrotechnique à Mada, pour ensuite bifurquer vers la mécanique pour ses études supérieures et finalement s’embarquer dans un doctorat en robotique à l’EPFL. C’est à cette époque que les deux Malgaches, originaires tous deux de la capitale, font connaissance.
Le permis B d’étudiant arrive à expiration et il faut envisager de retourner au pays, sauf si l’on trouve un travail. Ce sera Audemars Piguet et la Vallée de Joux. «J’avais envoyé 275 lettres de candidatures» (notez ceci, jeunes Suisses!), se souvient Tiavina. «A nouveau, j’ai dû tout rapprendre. Je ne connaissais rien à l’horlogerie». Il a dû faire ses preuves pour obtenir son permis C.
Les Niaritsiry saluent l’accueil reçu à La Vallée, notamment grâce à la paroisse. Comme beaucoup des leurs et «afin de donner en retour», ils ont créé une association: Mizarasoa (partager le bonheur en malgache) qui soutient des enfants au pays dans leur scolarité. «On est mieux ici pour aider les gens là-bas», commentent-ils en conclusion.
Heureuse de voir arriver une direction ouverte et souple dans un milieu où les résidents ont tellement besoin de gestes de tendresse . C’est, je crois , l’essentiel de leurs besoins , et bien des ” petits bobos ” passeront à l’arrière-plan !
De plus , des malgaches à la tête d’un EMS chez nous me fait particulièrement plaisir ,
vu qu’on a plutôt l’habitude d’aller les aider , eux . Changement que j’apprécie !
( Mon père a passé presque 6 ans dans cette institution )
Bon vent à vous , nouveaux , venus d’ailleurs , qui ont plein de choses à nous apprendre !
Fraternellement Geneviève Denoréaz
Bravo au nouveau directeur et sa compagne qui va apporter du soleil et de la lumière à tous les résidents