Jamais la population combière, en ce début de l’année 1871, n’avait vu défiler autant de soldats en déroute. Et jamais non plus, sans doute, ne pourrait-elle plus assister à une pareille débandade. Il s’agit donc là d’un événement unique de la vie régionale. Et à cet égard il convient de le marquer par une rétrospective qui verra surtout une grande exposition à l’Essor au début de 2021.
La déroute de l’armée Bourbaki est l’un des épisodes capital de la guerre franco-allemande de 1870 qui reste très méconnue dans toutes ses péripéties dramatiques et plus encore peut-être dans ses conséquences, puisqu’elle appellera en quelque sorte les deux guerres mondiales du XXe siècle entre ces deux mêmes belligérants et combien d’autres.
Cette déroute devait surprendre par son ampleur. Ce furent en effet quelque 87’000 hommes et 12’000 chevaux, avec un matériel d’une ampleur considérable, armes et canons en particulier, qui franchirent la frontière franco-suisse pour venir se réfugier dans les localités les plus proches, notamment Les Verrières, Sainte-Croix, Vallorbe et la Vallée de Joux. Le gros afflua aux Verrières. Pour la Vallée de Joux, non moins de 12’000 hommes y débouchèrent par le Risoud, menant quelque 500 chevaux.
Les récits de nos prédécesseurs, marqués à vie par cet événement unique, abondent. Par eux on aura l’occasion de découvrir de manière précise comment se déroulèrent ces journées des
1er et 2 février 1871.
Tout d’abord l’on sait par où cette troupe en déroute franchit le Risoud. Le gros passa par le Chemin des Mines pour déboucher sur le poste militaire de Tivoli. Arrivèrent par là quelque
9000 hommes qui furent aussitôt dirigés sur tous les villages de La Vallée qui les accueillirent. D’autres hommes passèrent par le chemin des Piguet et par le poste du Chalet Capt. Une cohorte enfin arriva par le chemin du Poteau et déboucha bientôt, une partie sur le Lieu, une autre sur les Charbonnières.
Si les militaires eurent la tâche de désarmer ces hommes et de les diriger vers les différents hameaux selon une clé de répartition hâtivement déterminée, c’est la population de La Vallée qui se chargea de nourrir cette armada à grand renfort de pain et de soupe aux pois. On vida les cagnards. On se serait même coupé en deux pour mieux recevoir ces pauvres gaillards frigorifiés et affamés. De nombreux hommes furent aussi accueillis dans les églises de la région où l’on avait étalé de la paille. Les lieux d’aisance n’y existant pas, on peut imaginer l’état des lieux quand nos réfugiés durent repartir, le lendemain déjà pour la plupart, vers la plaine vaudoise où des centres d’hébergement avaient été hâtivement créés.
Cet épisode de notre histoire devait laisser des traces indélébiles dans la mémoire populaire. Et on l’a dit plus haut, les textes laissés par nos meilleurs plumitifs, dans des mémoires en bonne et due forme, ou sur une simple missive d’un jeune homme à sa fiancée, par exemple, permettent aujourd’hui de comprendre la pagaille de ces deux journées.
Alidor Berney fut du nombre des chroniqueurs. Son texte, retrouvé par miracle reste malheureusement incomplet. Néanmoins il a permis à
M. Michel Freymond de retracer de manière saisissante ces quelques heures tragiques. Son récit est d’autant plus intéressant qu’il a été écrit en patois, la langue que nos prédécesseurs usaient quotidiennement lors de ces événements. Cet écrit, qui sera sans doute réédité à l’occasion de notre commémoration de 2021, nous fait retrouver de manière parfaite l’ambiance de ces deux journées.
Il y aura surtout, pour les faire revivre, une grande exposition à l’Essor en janvier-février. Mais on se doit de l’avouer ici, si la documentation est largement suffisante pour évoquer l’événement avec force détails, le matériel quant à lui manque cruellement. Certes, des contacts ont été pris avec l’arsenal de Morges qui nous soutiendra de manière efficace. Des liens ont été tissés avec l’Association Bourbaki Les Verrières qui commémorera elle aussi l’événement en plus d’avoir mis sur pied une Promenade Bourbaki digne du plus haut intérêt. Il nous serait utile néanmoins de savoir s’il existe encore quelques vestiges «combiers» de cette pathétique retraite: fusils, habits et autres équipements. Votre collaboration, à cet égard, serait précieuse.
Nous souhaiterions d’autre part accueillir en notre groupe de travail toute personne désireuse de nous fournir une aide efficace, comme aussi de riches idées. Les bonnes volontés seront donc les bienvenues. Elles peuvent se signaler dès aujourd’hui auprès du secrétaire du Patrimoine,
M. Jean-Claude Meylan, Le Solliat (021 845 51 66) ou auprès de son président, M. Rémy Rochat, Les Charbonnières (021 841 17 96).
D’avance merci pour votre intérêt à la cause Bourbaki!
Patrimoine de la Vallée de Joux