«Arrivés au Pont en plein hiver 1934, on ne voyait que de la neige tout autour de la gare». Gilbert Reymond s’en souvient précisément, même s’il n’avait que quatre ans, comme il se rappelle être sorti pieds nus découvrir cette neige omniprésente! La famille vient de déménager de Versoix: Louis, son père, originaire de Vaulion, s’accoutume vite à la vie combière et à son activité de chef de gare, alors qu’Elisabeth, sa mère, jusque-là couturière en ville de Genève, garde longtemps la nostalgie de la ville.
Gilbert Reymond fait ses classes au village, avec l’instituteur Jules-David Rochat puis Paul-Henri Dépraz en «prim’sup». Très engagé dans le mouvement scout, il joue également du violon avec bonheur. Son frère, de huit ans son aîné, part à Lausanne suivre l’Ecole normale; à la fin de sa scolarité, Gilbert suit le même chemin. Après une formation accélérée d’instituteur – on manque alors d’enseignants -, enrichie d’une activité musicale intense au sein de l’orchestre de l’Ecole normale, Gilbert reprend le chemin de La Vallée. Il se voit confier un poste de régent à l’école des Charbonnières: classe à sept niveaux d’élèves de 9 à 16 ans – il n’a alors que 19 ans. C’est ici qu’il va poursuivre sa vie d’enseignant et épouser sa jeune collègue arrivée de Morges, avec laquelle il fonde une famille. Ils auront trois enfants: Martine, Pierre-Olivier et Viviane.
Dans la commune du Lieu, Gilbert Reymond assume aussi les tâches alors assignées quasi d’office au régent: le secrétariat du conseil communal et la direction du chœur mixte. Cette dernière responsabilité, qu’il assumera pendant 30 ans, lui plaît tout particulièrement, la musique restant pour lui une vraie passion. Sous sa direction, le chœur travaille un répertoire populaire et sacré en présentant en concert, avec orchestre, des œuvres de Schubert, Schütz, Caldara, Haydn, Haendel et Buxtehude. En outre, Gilbert Reymond siège au sein du conseil d’administration de Migros Vaud: c’est pour lui l’occasion de découvrir d’autres milieux et de tisser de nouvelles amitiés.
A côté de leur vie à La Vallée, il y a le sud de la France: jeune couple, Gilbert et Elisabeth Reymond ont aimé sillonner la Provence et l’Italie en Lambretta, au début des années 1950. Les enfants venus, la famille «descend» aussi souvent que possible vers le sud: tout d’abord en faisant du camping avant d’acquérir un terrain en friche dans le Vaucluse en 1966.
Les vacances y sont consacrées au défrichage, au relèvement de murs, à la plantation d’abricotiers et de cerisiers, puis même, pas à pas, à la construction d’une petite maison. Amis et famille mettent la main au mortier et le chantier prend fin au bout de dix années. Ensuite, les travaux d’entretien du terrain, les soins au verger et la préparation du bois de chauffage l’occupent sans répit, mais Gilbert Reymond aime l’activité physique et la nature. «Avec le métier d’enseignant, les résultats sont plutôt perceptibles à long terme, alors que bâtir un mur permet de voir ce qu’on a fait!».
La retraite arrivée, c’est donc très naturellement entre La Vallée et le Vaucluse que le couple partage son temps, accueillant ici comme là-bas leurs sept petits-enfants puis, plus récemment, les arrière-petits-enfants. Alors qu’il fête ses 90 ans ce 15 février, Gilbert Reymond est heureux de pouvoir porter son regard sur ce riche parcours entouré de sa famille. Malgré de nombreux soucis de santé, il se trouve heureux de vivre.