
4 jours encore et ce lundi 1er février 2021 sera à honorer de manière toute particulière, puisqu’il y aura 150 ans jour pour jour que les Bourbakis pénétraient à La Vallée. Ceux-ci avaient fui les combats avec l’armée allemande à l’est du pays, avaient passé près de Pontarlier et des Forts de Joux, pour gagner ensuite Mouthe. De là, pour la portion congrue et avec le maire de cette localité pour guide, puis pour le gros de la troupe de Chaux-Neuve, ces soldats en retraite prirent le chemin de la Suisse où ils allaient être accueillis. D’aucuns, moins nombreux, poursuivirent leur chemin jusqu’à Chapelle-des-Bois pour traverser le Risoud et arriver à Bois-d’Amont où ils trouvèrent de même accueil et réconfort.
Ils étaient 11’000. La plupart échouèrent sur la commune du Chenit par le chemin des Mines et d’autres voies de dévestitures. Ceux venus directement de Mouthe ou les quelques détachés de la colonne principale, transitèrent par la commune du Lieu.
Ce fut, avec l’arrivée de ces milliers d’hommes, qui passèrent la nuit du 1er au 2 février 1871 dans les granges, mais surtout dans les églises, un bouleversement complet de la vie locale pendant au moins 48 heures, ou même 72 heures, le temps de se remettre des émotions intenses générées par un événement que l’on n’avait jamais connu et que par ailleurs l’on ne reverrait plus jamais.
On coucha des hommes sur la paille, on sortit des chaudrons en lesquels on fit cuire de la soupe presque jour et nuit, on tira des pains des fours jusqu’à ce que la farine vint à manquer. Bref, on réconforta tant bien que mal ces pauvres diables que pourtant, pour l’essentiel, l’on obligea encore à franchir dès le lendemain matin les cols du Mollendruz, ceux-là dirigés sur Cossonay où d’autres locaux s’ouvrirent pour eux, et du Marchairuz, ceux-ci pour aller rejoindre les casernes de Bière mieux équipées pour recevoir autant d’hommes. Morges sera au bout du voyage.
Ce formidable mouvement de sympathie de la part de la population pour les soldats français, fusiliers, canonniers et autres zouaves, tous éreintés, assoiffés et affamés, blessés parfois, aux pieds des souliers de fortune usés, voire même avec les chiffons qui en tenaient lieu, se déroula aussi en d’autres lieux du Jura. Ainsi passèrent par Vallorbe 28’000 hommes avec 4349 chevaux et 573 véhicules de tous genres. Par Ste-Croix 13’000 soldats. Par les Verrières, 34’000 réfugiés avec en plus un matériel considérable. C’est en vérité cette dernière localité qui resta le plus dans les mémoires. D’une part par le nombre des soldats qui transitèrent par ce vallon, et d’autre part parce qu’il servit plus tard de toile de fond pour la grande œuvre Bourbaki du peintre Edouard Castres et de ses collaborateurs. Elle constitue aujourd’hui le grand panorama de Lucerne, site qui, avec le Lion de Lucerne, le jardin des glaciers avec ses marmites glaciaires et son musée, le Palais des glaces, était le but presque obligé de nos courses d’école d’autrefois.
Une guerre oubliée que celle franco-allemande de 1870-1871? Pour la France en effet, car cette défaite humiliante alors même que l’on croyait infliger une déroute complète et rapide à l’armée allemande, vit la perte de l’Alsace et de la Lorraine. D’où une rancune française tenace contre sa grande voisine, une haine latente que l’on entretenait, savamment distillée par les médias et la classe politique de l’époque, non seulement parmi la population, mais tout autant si ce n’est plus dans les écoles publiques.
On travaillait en coulisse. D’où, de fil en aiguille, l’espoir de pouvoir prendre un jour ou l’autre une belle revanche. Et ce fut ainsi la première guerre mondiale. Et à la suite de celle-ci, nouvelle revanche à prendre, mais cette fois-ci par l’Allemagne vaincue. Ce fut la deuxième guerre mondiale.
Il n’est donc pas insensé de lier la guerre «oubliée» de 1870 aux deux grands conflits du XXe siècle. Certes bien d’autres causes les expliquent, néanmoins la guerre franco-allemande intervenue lors du règne de l’empereur Napoléon III, peut être comprise comme un véritable détonateur pour la suite des événements.
L’exposition consacrée à la retraite des Bourbakis à la Vallée de Joux eut dû se tenir en janvier et février de cette année, à l’Essor. Elle fut bientôt repoussée en février-mars. Pour les raisons que l’on devine, elle dut être annulée une nouvelle fois, et cette fois-ci de manière définitive. Néanmoins, nous pouvons rassurer notre population, de nouvelles idées sont apparues peu à peu en vue de redonner sa place à cet anniversaire incontournable parmi toutes les manifestations futures de 2021, qu’avec optimisme nous croyons encore possibles.
Mais en attendant ce nouveau rendez-vous, vous pourrez vous documenter sur la guerre franco-allemande de 1870-71 et sur le passage et l’hébergement des Bourbakis en terre combière, en vous procurant les ouvrages proposés dans l’annonce jointe.
Merci d’avance de votre intérêt et à bientôt donc pour ce grand retour des Bourbakis!
P-S: les résultats du concours Bourbaki paraîtront dans le cours du mois de février.
Patrimoine de la Vallée de Joux

