Trois invités de marque ont animé l’AG du Pevho au Sentier, le 10 novembre dernier, en plus du toujours affûté président-fondateur Joël Meylan.
Un peu plus de vingt personnes, pêcheurs amateurs ou professionnels et intéressés à la gestion des eaux de l’Orbe, ont pris part à l’assemblée générale annuelle de La Protection des Eaux de La Haute-Vallée de L’Orbe (Pevho).
Philippe Hohl, chef de la division Ressources en eau et économie hydraulique au Canton, a présenté un projet de renaturation des bords de l’Orbe en amont de la STEP du Sentier, sur un peu plus d’un kilomètre. Sont prévus un couchage des berges côté Orient, en face du Centre sportif ainsi que la plantation de bosquets au pied des berges et d’arbres de haute futaie. Une mise à l’enquête est prévue l’an prochain. L’ombrage acquis à terme devrait permettre de faire baisser de quelques degrés l’eau de la rivière sur ce tronçon. C’est l’objectif visé et, en creux, la hantise des adhérents du Pevho: l’étiage (les basses eaux) de l’Orbe causent des pertes terribles parmi les poissons à cause de températures qui deviennent trop élevées. Côté Bois d’Amont, un cordon de huit cents mètres vient lui aussi d’être reboisé.
Station de mesure sur le Brassus
Autre bonne nouvelle, une station de mesure de débit a été installée l’an dernier sur le Brassus, rivière au rôle essentiel dans le système hydrographique local. Là où le Pevho a toujours milité pour un débit minimal garanti, l’émissaire cantonal a répondu que celui-ci était déjà appliqué, par le biais de la loi, pour les besoins « nouveaux », à savoir la production de neige artificielle et l’alimentation des alpages. Et côté français, le site des Rousses vient d’être inscrit sur la liste des zones humides d’importance internationale (liste de Ramsar).
La Suisse est connue comme le « château d’eau de l’Europe » puisque les trois grands fleuves qui sillonnent celle-ci y ont tous leur source (ou au moins un affluant majeur pour le Danube). La Vallée de Joux a ceci d’assez exceptionnel que « sa » rivière, l’Orbe, prend sa source en France et donc qu’une partie des problèmes qu’elle rencontre est liée à l’apport d’eau (60%) en provenance des Rousses. Le président du Syndicat Intercommunal des Eaux du Plateau des Rousses (SIE) Alain Desprez était présent pour aborder le dossier de son point de vue et le défendre vigoureusement. En effet, le fait que cinq des six mesures préconisées par le Pevho sont du ressort de la France voisine a piqué au vif l’élu français, après qu’il les a découvertes l’été dernier sur des panneaux informatifs placés autour du lac de Joux.
Les Français ne prélèvent pas trop!
Et de livrer au public les résultats d’une enquête récente et de tableaux chiffrés fort à propos: la consommation d’eau sur le Plateau des Rousses a diminué de 30% entre 2008 et 2018. Certes, une partie de l’eau pompée dans le lac des Rousses alimente des ménages au-delà de la ligne de partage des eaux Rhin/Rhône, sur les communes de Lamoura, Prémanon, Lajoux et même Septmoncel ; cela pose problème au regard du respect des bassins versants. « Mais les quantités sont anecdotiques, de l’ordre de 6% du volume annuel qui traverse l’Orbe. » Finalement, les pics touristiques que connaît la station des Rousses, avec une augmentation de la population résidente de 30% en hiver et de 10% en été, sont modérés et n’affectent donc pas sensiblement la consommation de la précieuse ressource, toujours selon Alain Desprez.
Le SIE du Plateau des Rousses dessert une population à peine supérieure à la population combière, répartie sur sept communes. Il vend également de l’eau à quatre communes supplémentaires, dont le hameau franco-suisse de la Cure.
Lacs vides ?
Dernier apport de la soirée, un « Temps présent » de mai dernier sur la raréfaction des eaux dans le Jura, en particulier sur le bassin du Doubs. Intitulé « Alerte pénurie d’eau», le documentaire a été présenté et commenté par son auteur, le journaliste Jean-Daniel Bohnenblust Le public a été frappé de découvrir des paysans neuchâtelois forcés de se faire convoyeurs d’eau pour leurs bêtes et plus encore, de voir le lac des Brenets (en-dessous du Locle) asséché. La modification du régime des eaux, appelée « méditerranéisation », se résume à ceci : moins de précipitations dans le Jura, et davantage dans les Alpes.
Ce n’est pas demain la veille qu’on verra le fond de « notre » lac Brenet, a fortiori du Lac de Joux ! A écouter les personnes présentes à l’Hôtel de Ville du Sentier, cependant, un tel scénario n’est apparemment plus de la science-fiction. Car sur le fond, la problématique du débit de l’Orbe reste prégnante et préoccupante.
Joël Meylan relevait toutefois en conclusion : « Au début de notre activité, en 2008, l’on nous a reproché d’être piquants, un peu réacs’. Mais sans doute que nous n’en serions pas là aujourd’hui sans cela. » Et un ancien député de renchérir : « Notre président a effectivement pris de la bouteille dans ce dossier en une douzaine d’années, il est devenu très compétent. »