Témoignage d’une mission ciblée et d’un sauvetage spectaculaire remplie par Daniel Trotti, du Rocheray, avec une quinzaine d’amis.

Turkish Airlines.
Il était sur le qui-vive depuis l’annonce du tremblement de terre. Engagé depuis vingt ans avec l’ONG transfrontalière USAR-GIS (pour Urban search & rescue – groupe d’interventions et secours), Daniel Trotti s’attendait à un appel de la centrale.
L’actuel responsable d’exploitation des bâtiments à la Commune du Chenit a déjà participé à une quinzaine de missions sur des théâtres de catastrophes, au Népal, au Pakistan, en Haïti et l’an dernier, en Ukraine. Le plus souvent en base arrière, c’est-à-dire en Suisse, un rouage néanmoins essentiel et plus rarement sur le terrain, mais toujours avec son épouse Laurence, également engagée chez Caritas.
Sur place en vingt-quatre heures
«Lundi dernier (6 février), raconte le sexagénaire, il nous a été demandé de nous tenir prêts au besoin et le lendemain, l’appel à partir était confirmé. Mercredi matin, une quinzaine de membres était sur place. C’est toujours comme ça, notre unité est petite, mobile, rapide et spécialisée. Nous sommes au rendez-vous dans les vingt-quatre heures. » Sur place signifie Elbistan, ville de la taille du grand Lausanne, située à 1’200 mètres d’altitude dans la province de Kahramanmaras, chef-lieu et épicentre du séisme.
« Nous avons transité par l’aéroport d’Istanbul et atterri à Adana. J’ai compté quatorze nationalités différentes parmi les groupes de secouristes. Le tri des volontaires était géré par des Allemands et des Suisses alémaniques. Nous avons reçu notre mission de la PC turque. Contrairement à ce qu’on a pu lire, j’ai trouvé que tout était bien organisé sur place », poursuit Daniel Trotti.
Un SMS salvateur
Leur mission, par ailleurs couronnée de succès, a été relatée dans les colonnes de notre confrère
20 minutes, qui avait dépêché deux journalistes dans l’expédition : extraire un habitant du coin, trentenaire, prisonnier d’un immeuble effondré suite à une réplique de la secousse initiale. Cet homme avait été localisé grâce à l’envoi d’un SMS, localisé rétroactivement dans cet immeuble. Daniel Trotti complète: «La personne s’est retrouvée soudainement du 7 e au rez-de-chaussée. Sa chance est d’avoir été alors dans une cage d’escalier, qui l’a pour ainsi dire protégé. Il a passé trois jours sous les décombres. Il est le seul survivant.»
Vingt-cinq heures de mission…
« Dans l’équipe, nous avons tous la même formation et les mêmes compétences de base, même si certains sont aussi médecin, ambulancier, maître-chien ou spécialiste en statique des bâtiments effondrés. À Elbistan, nous étions équipés de petites caméras, d’outils spécialisés et surtout : d’un chien ».
Leur travail, Daniel Trotti le compare à une intervention en sauvetage spéléo, mais dans une grotte à moitié effondrée et qui pourrait collapser définitivement.
Le vendredi à onze heures, le malheureux peut être ramené à la lumière. Le sauvetage a duré vingt-cinq heures. Une autre famille présente sur place a demandé que les sauveteurs renvoient le chien pour un proche enseveli lui aussi dont plus personne n’avait de nouvelles. Recherche effectuée mais malheureusement sans succès.
… et puis s’en va
Et c’est déjà l’heure de rentrer. « Les conditions météo et logistiques ne nous permettaient pas de prolonger notre séjour et nous avions rempli notre mission. C’est toujours comme ça, “l’artillerie lourde” arrive toujours après nous », explique encore Daniel Trotti.
Si la mission n’a pas ému plus que ça l’ancien pompier, carapace professionnelle des sauveteurs oblige, en revanche, le soutien et la reconnaissance des uns et des autres l’ont beaucoup touché : « Un habitant nous a offert le taxi. J’ai aimé la gentillesse des habitants, leur façon de nous dire merci sans arrière-pensée. Dans l’avion, notre équipe a été applaudie et le commandement de bord a autorisé notre chien en cabine. A l’arrivée à Cointrin, il y avait une délégation consulaire pour nous accueillir et nous remercier, avec la police, les pompiers et la douane. »
USAR-GIS dépend entièrement de fonds privés. Ses membres paient même une cotisation qui couvre leurs dépenses administratives. Daniel Trotti, lui même titulaire du brevet fédéral d’instructeur pompier, l’a rejointe peu après sa fondation. Établi à La Vallée depuis 2011 en provenance de Veyrier, il a persévéré dans cet engagement.

Daniel Trotti, seul Combier de l’expédition.