Le Collectif Citoyen pour la Sauvegarde des Écoles Villageoises de la Vallée de Joux (SE2VJ) s’est spontanément créé après l’octroi du crédit d’étude relatif au projet « Campus Vallée de Joux », et a adressé le courrier suivant aux autorités concernées le 20.06.2024 :
Mesdames, Messieurs,
Lors de la séance du lundi 25 mars 2024, le Conseil communal du Chenit a octroyé à la Municipalité un crédit de 1’450’600.- CHF pour la première phase de l’étude concernant la réalisation d’infrastructures scolaires et sportives de la Vallée de Joux. Cette demande de crédit fait suite au rapport “plan de développement des infrastructures scolaires et parascolaires version 1.0” rédigé par l’ASIVJ.
Selon les arguments développés dans ce plan, le regroupement de toutes les structures scolaires, sportives et parascolaires sur le site de Chez-le-Maître et la fermeture de toutes les autres écoles de La Vallée (Le Brassus, Les Cytises, L’Orient, Les Bioux, Le Lieu) sont justifiés par l’évolution du cadre pédagogique et la nécessité de rendre plus efficiente la journée continue de l’élève, tant du point de vue de l’organisation scolaire que de l’organisation parascolaire (plan ASIVJ – préambule page 3).
L’ASIVJ se positionnant clairement en faveur du regroupement unique (plan de l’ASIVJ page 23), le crédit d’étude est uniquement destiné à étudier et promouvoir la variante “site unique”.
L’intention est sans doute bonne et motivée par la volonté d’améliorer l’offre scolaire à la population combière. Mais de notre côté, nous sommes convaincu.e.s qu’il existe d’autres solutions, permettant de conserver les écoles villageoises dans les buts de promouvoir les sites scolaires de proximité et de séparer les classes du premier cycle primaire
(1P à 4P) de celles des cycles suivants (5P à 11S).
La concentration d’environ 800 élèves âgés de 4 à 16 ans en un seul et même lieu nous préoccupe beaucoup, car cela pourrait provoquer une augmentation du harcèlement scolaire et des violences (morales et/ou physiques) entre élèves, les plus jeunes étant le plus susceptibles de devenir victimes.
Ces derniers méritent une attention toute particulière, d’autant plus qu’ils font leurs premiers pas à l’école obligatoire.
Votre assertion selon laquelle les plus grands s’occupent des plus petits (mentionnée en page 4 du rapport de la COFIN) nous semble particulièrement optimiste (voir inconsciente). Outre ce fait, il est peut-être bon de rappeler que l’éducation et le soin des enfants, quel que soit leur âge, sont le devoir des parents ou des tuteurs légaux, mais certainement pas d’élèves à peine plus grands et encore immatures.
Alors que le système éducatif a tendance à vouloir rappeler aux familles que d’élever un enfant est avant tout le devoir des parents, les projets de regroupement et, à terme, celui de l’école continue (plan de l’ASIVJ page 23) risquent de réduire le temps passé en famille de celles qui résident loin du site de Chez-le-Maître, notamment durant la pause de midi. Est-ce là réellement un changement de paradigme souhaitable ?
La vision de l’ASIVJ sur les bienfaits d’un site unique à Chez-le-Maître nous laisse également songeurs: “un regroupement des écoles sur le site de Chez-le-Maître, à proximité de l’ETVJ et du Pôle Santé dans un campus intergénérationnel favorise les échanges qui permettent une plus grande harmonie dans la société et une reconnaissance mutuelle et tolérante des individus entre eux. Nous visons un monde plus égalitaire où les échanges de services, de savoirs et d’expériences respectent les principes collectifs en induisant un comportement actif du jeune citoyen dans la vie quotidienne et publique” (§6 Projet de campus, page 24).
Vous arguez que “[l’]un des objectifs du regroupement est de créer une identité forte et une vie d’établissement sans scission entre primaire et secondaire afin de devenir encore plus attrayant pour les futurs enseignants, les familles souhaitant s’installer dans notre Vallée et ainsi, les fidéliser à notre région” (plan de l’ASIVJ page 21).
Toutefois, nous doutons que la fermeture des écoles villageoises augmentera l’attractivité de notre belle Vallée, dont les frontières ne se limitent pas au Sentier.
La proximité des écoles est depuis longtemps un critère d’établissement important et reconnu. La proximité et la taille raisonnable des écoles font sens pour les familles, puisqu’elles favorisent la mobilité douce et une certaine autonomie des enfants, tout en étant vecteur de vie sociale, notamment par la rencontre des parents aux abords des écoles.
Nous redoutons que la fermeture des écoles villageoises n’entraîne la désertification de nos villages, et que cela ait un impact considérable sur le moral des habitants, notamment des aînés, qui ne seront certainement pas tous pensionnaires de votre futur EMS, et qui apprécient tout particulièrement l’élan de vie apporté par nos enfants. Nos villages semblent voués à devenir des villages dortoirs, et la population risque d’en faire les frais, notamment les petits commerçants qui pourraient souffrir d’une sévère baisse de fréquentation dans les commerces de proximité.
Un projet aussi conséquent, tant bien socialement que financièrement (rappelons que selon le rapport de la COFIN, il s’agit de l’investissement le plus important de l’histoire de la Commune du Chenit) soulève énormément de questions, que nous souhaitons soumettre à nos autorités:
● Pourquoi uniquement une analyse “tout ou rien” (garder la totalité du bâti existant ou tout concentrer sur un seul site) ?
● Que deviendront les bâtiments scolaires existants? Quels seront les coûts de leur adaptation à de nouveaux usages ?
● Comment sera financé un investissement estimé à plus de 40 millions, rien que pour la première phase, et dont le coût total devrait être compris entre 50 et 80 millions au total?
● Les impôts seront-ils augmentés? Quelles seront les conséquences sur le budget communal?
● Selon le plan de l’ASIVJ (page 34), les variantes “multisite” et “site unique” nécessiteraient un investissement équivalent: sur quelles études cette affirmation se fonde-t-elle? Est-elle mise à la disposition de la population?
● Où peut-on consulter l’étude qui prévoit une économie de 40 à 50% sur le coût des transports actuels par rapport au site unique? (cf. rapport de la COFIN, page 3)
● Comment sera organisé le transport scolaire, notamment pour les élèves habitant à l’autre bout de La Vallée et qui risquent d’être pris par le temps lors de la pause de midi?
● Comment comptez-vous absorber un éventuel surplus d’élèves sur le site unique de Chez-le-Maître, dans le cas d’une mauvaise estimation du nombre d’élèves ou d’une hausse de population?
● Quel est l’avis du corps enseignant, notamment celui des enseignant.e.s de cycle primaire, au sujet du site unique? Ont-ils seulement été consult.é.e.s ?
● Avez-vous envisagé de demander l’avis de la population avant de vous engager dans ce projet?
Votre projet de site unique aura des conséquences considérables sur toute La Vallée: sur son apparence, sur ses finances, sur ses habitants…
Si bien que, tout comme le projet de fusion des communes, la population mériterait d’être consultée.
Une votation en bonne et due forme serait sans doute très appréciée des Combières et Combiers, et nous espérons vivement que nos représentants élus auront à cœur de prendre en compte tous les avis sur ce projet, notamment des premières concernées: les familles résidentes de la Vallée.
Dans l’attente de vos réponses à toutes nos interrogations, nous vous adressons, Mesdames, Messieurs, nos salutations les plus respectueuses.
A. Pauchard | A. Bardet
C. Bassetti | J-C. Meylan