En date du 15 juin dernier, la municipalité de L’Abbaye, sous l’impulsion de M. Patrick Berktold, Municipal en charge des forêts, domaines et alpages adressait un courrier aux conseillers d’Etat
Mme Valérie Dittli et M. Vassilis Venizelos pour leur faire part des inquiétudes croissantes suite aux récentes attaques de loup sur le territoire communal.
En effet et depuis la toute récente montée pour les estivages dans les chalets propriétés de la Commune de L’Abbaye, les attaques de loups ont repris mais cette fois-ci à un rythme bien moins espacé que celles de l’année 2022. Celles-ci ont débuté le jour même des montées, sont quasi hebdomadaires et ne se font plus exclusivement la nuit. Les bergers sont sous tension, les amodiataires désemparés, ne sachant comment et quoi faire face à cette situation qui s’amplifie et qui manifestement est absente de tout contrôle. La population locale partage également son inquiétude et s’interroge sur les réels risques et dangers encourus.
Mme Valérie Dittli, M. Vassilis Venizelos et leurs directeurs respectifs en l’occurrence M. Frédéric Brand, Directeur de la DGAV-DAGRI et
M. Sébastien Beuchat, Directeur de la DIRNA ont accepté cette invitation pour une rencontre se déroulant le jeudi 13 juillet dans la salle du Conseil communal de L’Abbaye. Y participaient également pour la Commune de L’Abbaye, Patrick Berktold Vice-syndic, Mme Carole Harlé-Voutaz et M. Claude Piazzini municipal. Pour la Commune du Lieu, Mme Sylvie Aubert Brühlmann, vice-syndic et M. Benoit Meylan, municipal en charge des alpages. Pour la Commune du Chenit, Mme Carole Dubois municipale et vice-Syndic et M. Jean Fred Capt, municipal également en charge des alpages.
M. Patrick Berktold ouvrait cette séance par la présentation des résultats de l’enquête qu’il a menée auprès de
27 amodiataires, propriétaires des chalets et bergers figurant sur le territoire communal de L’Abbaye ainsi que sur les communes avoisinantes (Le Chenit, Vaulion, Ballaigues, Lignerolle et La Rippe).
La démarche visait à « donner parole » aux acteurs des enjeux globaux de l’activité pastorale par le biais d’un questionnaire scindé en quatre chapitres (coordonnées des alpages, les conséquences des attaques, les relations des amodiataires entre les différentes parties ainsi que les propositions, les pistes de réflexion), mettant en exergue plusieurs éléments, peut se résumer de la sorte.
L’inquiétude quant à la pratique et l’avenir des activités pastorales est prépondérante. La qualité de vie et du travail fourni par les amodiataires et les bergers est sérieusement compromise. Le stress, l’anxiété, l’inquiétude et l’absence de réponses concrètes pour faire face à ce phénomène en plus des complications liées au manque d’eau sur les alpages sont largement mentionnés. Les aspects financiers au-delà des indemnités allouées sont sous-estimés pour une grande partie des sondés.
La confiance envers les autorités est souvent compromise, un sentiment d’abandon est sous-jacent. L’impartialité et le manque d’objectivité de la presse ressort majoritairement. L’impression de dissimuler les faits et le vécu des amodiataires et des bergers laisse un sentiment amer à ces derniers.
L’espoir peut venir des mesures actuelles (à défaut d’autre chose) telles que les effarouchements alors que celles préconisées par les services de l’état ne semblent guère efficaces puisque les attaques se font de jour depuis le début de l’année 2023.
Les attentes sont fortes et notamment des décisions politiques claires, pragmatiques et efficaces visant une poursuite plus sereine de leur activé. Il faut absolument une régulation de ce grand prédateur.
Cette enquête a permis de faire entendre leurs voix auprès des autorités tant fédérales, cantonales que communales. M. Patrick Berktold porte également espoir que ces observations contribueront à mieux comprendre et appréhender le vécu de ces personnes qui assurent l’approvisionnement alimentaire de la population et de fait d’un pan entier de l’économie tant régionale que cantonale et nationale.
Mme Dittli et M. Venizelos remercient M. Patrick Berktold pour cette présentation et reconnaissent la pression des éleveurs et les difficultés actuelles liées au contexte légal et particulier de la régulation du loup. Conscient de ces difficultés, le Conseil d’état a adopté un plan d’action loup ce printemps. Ce dernier s’inscrit dans le cadre légal actuel fixé par la Confédération et reflète la volonté de trouver un terrain d’entente entre des intérêts souvent contradictoires. Une révision de la loi a toutefois été adoptée par les chambres fédérales et donnera plus de marges de manœuvre aux cantons. Celle-ci devant entrée en vigueur en 2024, sera plus adaptée à la situation actuelle et permettra une phase de régulation et une politique d’anticipation plus active. Le canton de Vaud est donc actuellement dans une période de transition. Néanmoins il souhaite plus communiquer, par des séances d’information, par des visites sur les alpages et partager sa volonté commune pour trouver des solutions conformes au droit fédéral. Il est nécessaire de trouver les bons équilibres pour une coexistence entre le loup et l’activité des alpages.
Le plan d’action loup 2023 et ses actions mises en place sont présentés par M. Sébastien Beuchat. Au vu de la dynamique actuelle de l’espèce, une intensification du monitoring et suivi local du loup est en cours, afin d’approfondir les connaissances sur le prédateur et de tester des mesures de protection. Ce monitoring doit également permettre de faciliter les actions de régulation.
M. Frédéric Brand a précisé les actions de prévention et une meilleure prise en charge des dommages causés aux animaux de rente. Elles concernent notamment les effarouchements, le chien de protection adapté pour les troupeaux de moutons ainsi que pour les bovins ou encore les barrières physiques.
La procédure des autorisations de tir a également été abordée, depuis son délai de traitement jusqu’à sa mise en œuvre après l’obtention de la validation du tir.
En fin de séance, les membres de la délégation cantonale remerciaient les initiateurs de cette rencontre et les autorités municipales pour cette invitation et pour la qualité des échanges.
Nous pouvons conclure par ces échanges et les informations transmises tant par Mme Valérie Dittli, par M. Vassilis Venizelos, par M. Sébastien Beuchat que par M. Frédéric Brand, de la complexité de la situation et l’impasse présente actuellement.
Un fort espoir est cependant porté sur la modification de la prochaine Loi sur la chasse qui devrait permettre une régulation plus soutenue du grand prédateur et une politique d’anticipation contrairement à la situation actuelle, guère soutenable pour les amodiateurs et les bergers dans leur quotidien.
L’Abbaye, le 21 août 2023
Patrick Berktold,
Municipal de la Commune de L’Abbaye en charge des alpages