Le centre du Sentier était bouclé le samedi 19 mai pour la traditionnelle foire. L’occasion d’interroger quelques anciens sur la manière dont ils ont vu la manifestation évoluer au fil du temps et de découvrir aussi quelques nouveautés.

«Que de la bébelle…»
Le stand de la Maison de Paroisse est aussi ancien que le rachat du bâtiment lui-même (un ancien débit de boisson et hôtel bien situé sur la Grand-Rue), dans les années 70. En plus de son large stand orange, la Maison de Paroisse exposait, dans sa grande salle de plain-pied, vieux livres ou ustensiles de cuisine fournis par les paroissiens et revendus pour quelques francs. «Notre brocante est fournie cette année», détaille Stanley Tramaux, président de la Fondation (à dr. sur l’image) «car nous étions absents la foire précédente, il y a donc deux fois plus d’objets».
A ses côtés, Théo George, l’ancien tenancier, témoigne avoir vu passer quarante-huit foires. Il se souvient: «Il y avait beaucoup plus de monde à l’époque, les stands s’étalaient jusqu’à la pharmacie [actuels bureaux d’Unia ndlr] en direction du Pont et jusqu’à la rue de la gare de l’autre côté. Aujourd’hui, on ne vend plus que de la “bébelle”». Cette expression ramenée du Québec signifie à peu près camelote.
«On a vendu tous nos vélos»
La gendarmerie a tenu -grande première- un stand devant l’Hôtel de ville où elle a ses locaux. Il s’agissait, aux dires du sergent-major Bonnevaux (à g. sur l’image), de joindre l’utile à l’agréable pour un corps militaire soucieux d’un rapport cordial avec la population; concrètement, d’effectuer un peu de prévention, principalement sur des questions de deux-roues et de sécurité et de vendre les nombreux vélos abandonnés ou perdus récupérés par la gendarmerie. Le sgt maj Bonnevaux explique la procédure: «Nous remplissons une fiche avec la date d’entrée du vélo perdu, à partir de laquelle nous attendons pendant une année qu’un propriétaire se manifeste. Ensuite, c’est la parution dans la Feuille des Avis Officiels et dans la FAVJ, ensuite la revente». Les quarante-deux (!) vélos exposés ce jour-là représentent donc le «crû» 2016, «une grosse année», précise encore le sgt maj.
L’appointé Décoppet (à dr.), bientôt retraité, se souvient lui aussi: «C’est nous, à la police municipale, qui gérions la foire jusqu’à il y a huit ans. Depuis, les employés municipaux ont repris le flambeau. Il y a eu jusqu’à cent stands, contre une soixantaine aujourd’hui». Historiquement, en effet, le marché remplissait un rôle social important. C’était une foire agricole et plus d’un Combier venait se fournir en habits et chaussures, en articles de quincailleries, etc. Aujourd’hui, cela n’a plus rien à voir.»
Les seuls à s’en sortir vraiment: les vendeurs de nourriture
Le marché a évolué, la vente en ligne change tout et on ne trouve plus que de la bébelle à la foire, comme disent les anciens. Les seuls à vraiment tirer leur épingle du jeu, ce sont les forains qui proposent de la nourriture à consommer sur place. A l’image, Kha Ton Hoang, un Sino-Vietnamien qui propose des menus d’Extrême-Orient cuits au wok. Son épouse, loquace mais qui ne veut pas paraître à l’image, raconte: «Cela fait vingt-cinq ans que je viens à la foire combière. Avec le temps, je connais tout le monde, les anciens me saluent, même s’ils ne consomment pas, c’est sympathique. Des gens que j’ai connus enfants me reconnaissent encore, ils sont devenus adultes. Il est arrivé plus d’une fois que je consulte la météo le matin même et que je renonce à monter, mais l’on m’appelle pour me demander ce que je fais et où je suis. Alors je monte…». Les Hoang ne font pas de vieux os ce jour-là. Dès treize heures, ils parlent de plier et de partir. C’est aussi cela, l’expérience: quand le ciel menace et que l’heure du repas a passé…
Un petit somme et on remet ça
Ce forain est-il déprimé devant sa panoplie de robes pour filles? Ou par l’arrivée du mauvais temps en milieu de journée? En effet, il pleut proverbialement à la foire. Cette cuvée 2018, entamée pourtant sous un ciel radieux, n’a pas dérogé à la règle. Plus probablement, l’homme pique un petit somme à l’abri de sa camionnette. Beaucoup de forains viennent de loin, Sainte-Croix, Valais voire Franche-Comté et se sont levés tôt ce matin-là.
L’un d’entre eux, qui vend terrines et saucissons, témoigne pourtant de l’importance de venir au contact de la population pour la vente directe, à l’ancienne: «Nous faisons 80% de notre chiffre d’affaires sur les marchés et les foires.»
L’UDC au contact sur un thème émotionnel
Autre «première» de cette foire: un stand UDC. Le parti agrarien, en quête de visibilité localement comme dans le reste du canton, profitait de l’occasion pour récolter des signatures en faveur de sa pétition «pour obtenir l’accès motorisé aux refuges fréquentés du Risoud», un thème à forte résonance émotionnelle auprès des Combiers. L’Amendement Bonny a rouvert le dossier, aux yeux des initiants, en ajoutant à la loi forestière vaudoise la possibilité pour les communes de «soustraire des routes forestières à l’interdiction de circuler». A ce jour, la pétition a recueilli 1 500 paraphes pour demander à la commune du Chenit de faire usage de ce droit, en solllicitant une dérogation à la loi pour onze refuges fréquentés. «Nous n’avons pas encore beaucoup de membres dans la section», déclare son président Daniel Briand (en chemise d’armailli, à côté de Lucie Rochat) «mais par contre, beaucoup de sympathie pour notre pétition.»
Ambiance de slowUp
Des riverains ont profité de la fermeture de la Grand-Rue pour improviser un barbecue familial. A l’arrière-plan, le ciel menace. Ce ne sont pas les forces de l’ordre qui imposeront un retour à l’intérieur (ceux-ci écoulent leur stock de vélos cent mètres plus loin) mais la pluie, tout simplement.