Ciné-Doc a le plaisir de vous présenter le documentaire «143 rue du désert». En présence du Festival cinémas d’Afrique – Lausanne pour discuter une discussion avec le public.
Le public pourra découvrir un film de ce festival dont la 15e édition a été annulée cet été. Une belle et rare occasion de découvrir cet événement dont l’objectif est de défendre, soutenir et promouvoir les cinémas africains.
143 rue du désert
En plein désert algérien, le long de la route transsaharienne, Malika tient le seul café à des kilomètres à la ronde. C’est là que les routiers et les voyageurs s’arrêtent le temps d’une omelette, d’un thé ou d’une cigarette pour partager un moment de leur existence. Malika, seule femme au milieu d’un monde d’hommes, aussi attachante que généreuse, nous invite à sa table le temps de ce que l’on pourrait nommer un «road movie immobile».
Par la poésie de ses images, la force de ses rencontres, 143 rue du désert nous raconte avec subtilité l’âme d’un pays.
143 rue du désert, Hassen Ferhani,
Algérie, 2019, 100’, VOSTFR, 16/16 ans
Le Sentier
dimanche 8 novembre, 10h30
Cinéma La Bobine
Suivi d’une interview filmée du cinéaste
Sous réserve de l’évolution de la situation sanitaire.
Aussi à Payerne, Orbe, Chexbres, Bulle, Morat, Delémont
Détails: www.cinedoc.ch
Six questions à Hassen Ferhani, réalisateur du film «143 rue du désert»
Comment se retrouve-t-on à faire un film sur Malika, tenancière d’un petit café au milieu du désert du Sahara en Algérie?
Mon projet initial était de prendre la route, traverser des paysages et faire un road movie. C’est un genre de film qui m’a toujours fasciné. Pour les repérages, je suis allé vers le sud de l’Algérie, pour trouver des lieux, des personnages, des histoires… Lors d’un de ces voyages, j’ai été rejoint par Chawki Amari, un de mes amis écrivains. Nous avons fait une longue traversée qui nous a conduits vers le centre du Sahara sur la «Route One» qui relie Alger à Tamanrasset. Amari avait rencontré Malika pour l’un de ses livres et il m’a emmené chez elle.
Et là vous n’imaginiez pas l’intensité de la rencontre?
Dès que je suis entré chez Malika, j’ai su que c’était là que se trouvait mon film. L’idée m’est venue qu’ici on pourrait faire un road movie inversé. Un road movie fixe avec tout le paradoxe que cette idée peut contenir. J’ai tout de suite adoré cet endroit simple qui abritait tant de choses, en plus du charisme et de la force de cette femme, qui est là au milieu de nulle part. C’est incroyable ce qui peut être dit et peut se produire dans un espace de 20 mètres carrés situé au milieu de l’un des plus grands déserts du monde.
Au milieu de nulle part vous dites?
J’ai utilisé cette expression mais j’aimerais la remplacer par «au milieu de partout». Contrairement aux idées reçues, le Sahara n’est pas un lieu désert. C’est immense, cela semble très vide mais ce n’est pas le cas. Les gens y vivent, y travaillent et y voyagent. Il se passe tellement de choses là-bas. C’est ce genre de lieux qui ont des atmosphères qui leur sont propres et qui rassemblent des gens de tout le pays, que je recherche dans mon cinéma.
Et Malika est là au milieu de tout cela…
Oui, il y a cette femme incroyable qui a décidé d’écrire son histoire, qui a quitté le nord de l’Algérie pour s’installer là, où il n’y avait que des pierres, du sable, une chaleur insupportable, seule avec son chien et son chat et à plus de cinquante kilomètres de la maison voisine. Tout le monde connaît Malika à des centaines de
kilomètres à la ronde, elle connaît tous les camionneurs, leurs voyages, leurs histoires… Elle incarne cet endroit!
Peut-on dire que vous avez un regard philosophique sur vos personnages, comme s’ils se posaient parfois des questions philosophiques?
Au lycée, j’étais très mauvais à ce sujet! Mais effectivement quand les gens regardent mes films, ce sont des choses qui peuvent leur apparaître. Mais je ne suis pas à la recherche de philosophie. Je suis porté par quelque chose qui s’apparente à la sagesse populaire, à nos origines, à cette forme de richesse incomparable. Et au final, mes films montrent la diversité du peuple algérien. A l’étranger, mais aussi en Algérie, on a tendance à réduire les Algériens à une vision monolithique. Ce que j’aime dans mes personnages, c’est qu’ils peuvent justement avoir de nombreuses facettes et une grande diversité en eux.
Votre démarche demande une longue préparation à identifier vos lieux et personnages, mais vous avez, par contre, une logistique très légère au niveau humain et matériel…
Je passe beaucoup de temps à trouver un sujet et un lieu, mais une fois que c’est décidé, je commence rapidement à tourner. D’une certaine manière, la rencontre se fait pendant le tournage. Vu que je travaille en petite équipe, à deux personnes, la confiance s’installe naturellement. Je suis aussi directeur de la photographie de mes films, et je ne peux pas imaginer laisser la caméra dans les mains de quelqu’un d’autre… la caméra est vraiment mon outil d’écriture!
Ciné-Doc