
C’est l’histoire d’un lien tissé entre la Suisse, la Syrie, la Grèce et désormais l’Allemagne. Tout cela à l’initiative du Groupe d’Accueil Migrants (GamVJ). C’est l’histoire d’une femme Nour*, à peine trente ans, veuve, mère de deux enfants, Marie*, âgée de 3 ans et demi aujourd’hui et Gabriel*, 7 ans, ce dernier diagnostiqué autiste. C’est l’histoire de ma rencontre avec la sœur de Nour, Mariam*, établie à la Vallée de Joux. Une balade le long du lac, en tant que bénévole du GamVJ au printemps 2020 et désormais amie, puis, un plongeon dans les méandres de la procédure d’asile. Cela fait alors presque
2 ans qu’elle tente d’avoir des réponses.
Une chaîne de petits gestes secourables
A chaque jour suffit sa peine? Il m’est impossible de compter le nombre d’interlocuteurs sollicités pour réussir à collecter toutes les pièces du puzzle. Il a fallu jongler entre les langues, les documents administratifs, les relances, l’espoir, les doutes. Epuisée, je l’ai été, mais cela amène à réaliser ce que devait vivre les principales concernées, elles-mêmes. Se replonger quotidiennement dans la douleur du parcours de vie pour que je comprenne tous les éléments et que j’aille chercher, avec la bonne information, au bon endroit, à mon tour, vers les acteurs à Lausanne, à Berne, lesquels m’ont tous, d’une manière ou d’une autre, aidée à ne pas perdre espoir. Les juristes sur place, également qui tentaient par le biais d’emails, de WhatsApp, de messages interposés, d’aiguiller, d’avancer, de garder confiance, au milieu d’un camp de migrants en Grèce à la gestion chaotique.
Et en filigrane, Nour et ses enfants attendent.
Migrante à la merci
Si le refus de la Suisse à accueillir sa sœur est une nouvelle blessure que l’on peut tous mesurer, le fait de n’avoir aucune vision claire de la situation, de délais clairs, est probablement le plus difficile à vivre. Voir son destin, sa vie, son avenir aux mains d’institutions, d’organisations, continuer de vivre, de trouver assez de nourriture pour les enfants, batailler pour que le fils rencontre un médecin pour continuer le traitement d’autisme et de nouveau, attendre.
C’est précisément ce point d’urgence, la santé du jeune garçon, qui m’a donné, à moi la bénévole, l’énergie et l’envie de frapper à toutes les portes et de réunir des informations utiles, faire le tri et garder le contact avec Nour, sa bonne amie Yasmine* aussi, sans laquelle la présence et le soutien sur place pour traduire et synthétiser quand la maman était épuisée, a été essentielle.
Derrière les milliers, une histoire individuelle
Je souhaite ici relater l’histoire tragique de milliers de réfugiés à la recherche d’une reconstruction identitaire, loin de leur identité. Et plus encore, rappeler qu’il s’agit d’histoires individuelles, d’individus, dont le malheur qui nous affecte ou nous dérange consciemment ou non, vient avant tout bousculer la fragilité de notre existence, la nécessaire dépendance aux uns et aux autres.
Quand la pandémie exacerbe la fragilité
Je veux parler ici des Nour qui, derrière leur carapace digne, portent une charge mentale, psychologique dans l’inconnu du présent, dans l’incertitude de l’avenir, dans le flou du passé; tout cela en période de pandémie mondiale qui est venue exacerber plus encore la nécessité d’être solidaire, d’être attentif aux personnes fragiles.
Si Nour se sent aujourd’hui davantage en sécurité en Allemagne depuis Novembre 2020, le chemin de la réparation ne fait que commencer. Combien d’autres Nour ont-elles eu la chance d’être entendues, suivies, accompagnées?
Najate, bénévole au GamVJ
Accompagnement personnel
par exploration artistique
www.tobkalart.com