Voyager en Iran, c’est faire un saut dans l’Histoire : la première civilisation, celle de Elamites, date de 3000 ans avant J.-C. Toutes les citer nécessiterait une édition spéciale de la FAVJ. Mais n’allez jamais dire à un Iranien qu’il est arabe : non sans fierté, il vous répondra qu’il descend des Perses. Parmi les villes où je me suis arrêté, mon cœur s’est porté sur Chiraz et Sushtar.
Chiraz
Avec Ispahan, elle possède la plus belle des mosquées avec ses mosaïques multicolores et ses deux minarets. Il faut la visiter en fin d’après-midi lorsque le soleil baisse et donne une lumière très douce.
En tout Iranien doit sommeiller un ingénieur. Comment ces peuples ont-ils pu, parfois sur des centaines de kilomètres, creuser des canaux souterrains (les qanats) depuis les montagnes pour alimenter des régions désertiques ? Où trouver l’eau en abondance, comment calculer la pente, comment ensuite la distribuer de manière ingénieuse afin d’éviter l’évaporation ? Tels furent les obstacles à surmonter. Et qui dit civilisation dit eau : pour l’agriculture, pour faire des briques de boue et des faïences. Les Iraniens vouent un culte particulier pour leurs parcs arborés. Ils ont l’âme du jardinier et se font photographier devant des massifs de fleurs. Même à Téhéran, ville plutôt quelconque, de très grands espaces accueillent les familles pour un pique-nique et elles ne manqueront pas de vous inviter pour un thé. Les Perses furent également des bâtisseurs. Dans les hôtels ou les restaurants, les cours disposent d’une pièce d’eau rectangulaire ou pour le moins d’une petite fontaine bordée d’arbres et de fleurs en pots. L’hôtel traditionnel (nombre d’entre eux sont d’anciens caravansérails rénovés) est bâti sur une relation intime avec cet espace protégé. A l’intérieur, l’eau, les feuillages et la sécurité ; à l’extérieur, d’immenses zones arides autrefois parcourues par les brigands.
Shushtar
Mentionnée dans la Bible sous le nom de Suse, cette ville multimillénaire est proche de la Mésopotamie (Sud de l’Irak) baignée par le Tigre et l’Euphrate. Elle fut une cité majeure des Elamites et doit sa renommée à son système hydraulique qui avait permis la construction de moulins.
Les arts
J’ai eu l’occasion d’assister à plusieurs reprises à des concerts ou à des pièces de théâtre. A Yazd tout d’abord lors d’un festival en plein air où une troupe évoquait les douleurs de la guerre Iran-Irak
(250’000 – 500’000 morts). Un multi-instrumentiste «sonnait» comme Ibrahim Maalouf
à la trompette, accom-pagnant des acteurs qui exprimaient toutes les émotions de la population et des combattants durant ce conflit de 8 ans.
A Chiraz, rencontre avec deux artistes de rue. C’est l’art pictural traditionnel marqué par le choix des couleurs et le soin des détails qui est mis en avant. Et j’ai eu la chance d’assister à la remise des prix d’un concours de calligraphie, puis de m’entretenir avec l’une des lauréates. L’Iran, ce ne sont pas que des bazars, des mosquées et Persépolis. C’est aussi une culture marquée par le cinéma, les arts plastiques, la musique.
Jean-Yves Grognuz,
le 21.11.2022