La cité romaine de Pompéi est l’un des sites archéologiques les plus célèbres de l’Antiquité romaine. Ensevelie sous les scories du Vésuve en éruption un jour d’automne de l’an 79, redécouverte puis fouillée à partir du 18e siècle, elle représente une fenêtre unique sur l’art, l’urbanisme et la vie quotidienne dans l’Empire romain du premier siècle de notre ère. Les trouvailles faites à Pompéi et dans les sites romains voisins ont eu un retentissement considérable dans la vie culturelle et artistique des âges classique et romantique. C’est particulièrement le cas des peintures murales, l’héritage le plus accompli que nous ait laissé la cité campanienne. Spécialiste reconnu de l’art de la fresque antique, l’archéologue Michel Fuchs, professeur à l’Université de Lausanne, était l’invité de Connaissance 3 – Vallée de Joux le lundi 11 décembre.
Michel Fuchs a commencé sa présentation par l’historique de la ville, de sa disparition à la fois du paysage et des mémoires et enfin de sa renaissance avec les premières fouilles, entreprises sous l’égide du roi de Naples, Charles III. Très vite, Pompéi et sa voisine Herculanum suscitent la passion des savants, des intellectuels, des écrivains et des artistes. Le site devient une étape du Grand Tour européen, le voyage que les jeunes gens de bonne famille se doivent de faire au Siècle des Lumières. Les découvertes exceptionnelles se succèdent et suscitent des débats sur les méthodes de fouille et de conservation. On assiste dès lors, grâce à des pionniers dont le plus connu est Giuseppe Fiorelli, à la naissance d’une nouvelle discipline scientifique, l’archéologie.
Michel Fuchs nous invite à un tour d’horizon de la ville antique et de ses infrastructures urbanistiques: «tours d’eau», citernes, fontaines aux carrefours, thermopolia qui sont des comptoirs de street food avant la lettre, souvent richement décorés. Il nous a fait entrer dans les édifices où de nombreuses décorations murales ont été découvertes, bâtiments publics et demeures familiales. Au-delà de la grande diversité des sujets représentés, la vivacité, la fraîcheur et la beauté de ces fresques suscitent chez le spectateur une émotion très directe, comme si le temps d’un regard, vingt siècles ne comptaient plus.
L’activité de Michel Fuchs et de ses étudiants à Pompéi s’inscrit dans le renouveau des fouilles au cours de la dernière décennie, sous la direction de Massimo Osanna. Ces travaux visaient d’abord à consolider le site pour prévenir les dégradations dues aux intempéries, aux fragilités du terrain, aux infiltrations d’eau… et aux trois millions de visiteurs qui passent par Pompéi chaque année. Des découvertes remarquables ont suivi, qui posent de grands défis pour leur restauration. On mesure la difficulté de la tâche lorsqu’il s’agit de reconstituer des fresques à partir d’une collection de petits fragments tombés des parois et des plafonds, fragments dont l’emplacement d’origine n’est pas forcément connu: des puzzles qu’il faut résoudre sans connaître a priori les motifs représentés. Dans le domaine des peintures fragmentaires, l’équipe de Michel Fuchs s’est acquis une compétence largement reconnue et entérinée par des accords de collaboration avec les autorités du Parc archéologique ainsi que des universités partenaires. L’équipe a entrepris un travail de longue haleine sur la maison dite des Peintres au travail et Michel Fuchs nous en donne un aperçu avec la passion de l’enquêteur.
Michel Fuchs nous invite à porter un regard différent sur ce site parmi les plus visités du monde antique. Loin de n’être qu’un musée à ciel ouvert, Pompéi est bien vivante par les découvertes qui continuent d’y être faites et aussi par l’aspect inachevé, work in progress, d’une ville où nombre de bâtiments étaient en travaux au moment où la vie s’y est arrêtée. Enfin Pompéi vit de la fascination persistante qu’elle suscite, intérêt dont témoigne l’image finale de l’exposé, photo de groupe de l’équipe et de ses nombreux jeunes passionnés par les sciences de l’Antiquité.
Connaissance 3