24 Combiers atteignant leur majorité civile dans l’année rencontraient les représentants des autorités des communes à l’alpage des Croisettes, le 5 octobre. Cet événement traditionnel a été placé sous le signe de la transmission de valeurs et de l’encouragement à poursuivre ses rêves. C’est la troisième année seulement que les trois communes combières organisent ensemble leur soirée des nouveaux citoyens. En fonction du tournus, l’organisation revenait cette année et pour la première fois à L’Abbaye.

A la tombée du jour, les municipaux de toute La Vallée accueillent leurs nouveaux concitoyens au sortir du bus affrété spécialement pour l’occasion. Ils sont 24 à fêter leurs dix-huit ans dans l’année sur un total de 62.
Maître de cérémonie, Christophe Bifrare ouvre les feux en donnant un cours express sur la région, «comme vos enseignants ne vous l’ont jamais expliquée», à savoir que la Haute Combe est une région industrialisée comparable à un quartier de l’Ouest lausannois, pour la taille et pour le ratio places de travail – habitants: 1,13 aujourd’hui, 1,3 d’ici les années 2030. Autre donnée chiffrée, 96% de la surface de La Vallée est inscrite à l’IFP. Abréviation de l’Inventaire Fédéral du Paysage? Non, ces lettres signifient «Touche pas à ça, p’tit gars», ironise le syndic de l’Abbaye. «A croire que nous portons seuls la responsabilité d’être le biotope du canton… que dis-je, du pays tout entier!»
Déjà vos premières votations
«Vous héritez de nouvelles responsabilités, notamment celles de vous prononcer sur des objets cantonaux et fédéraux, parfois biscornus. Dès le mois prochain, ce sera une initiative populaire pour encourager financièrement les paysans qui renoncent à écorner leurs bovins. Les éleveurs pourraient décider pour eux-mêmes mais non, cela revient au peuple. Bienvenue dans la vie de citoyen!», lance Christophe Bifrare. Ce sera tout pour la partie citoyenne. Dernière recommandation du syndic: «Trouvez une voie professionnelle dans laquelle vous aurez du plaisir à vous lever le matin, parce que ça va être long!». La soirée bifurque alors nettement vers les leçons de vie prodiguées par des aînés à des nouveaux adultes.
Un entrepreneur témoigne
Laurent Golay livre un récit de sa carrière d’entrepreneur, qui l’a vu réorienter un métier traditionnel (la menuiserie) vers sa passion, à savoir les sports de glisse. Après avoir repris la menuiserie paternelle du Brassus en 2000, Laurent Golay a réussi à naviguer dans le marché des sports de glisse et des sports fun en évolution permanente; le quadragénaire fait notamment état de ses tâtonnements et de ses erreurs, avec sa volonté de suivre son produit (les planches) de A à Z. A force d’inventivité et de ténacité, il est aujourd’hui sollicité par de grandes marques. «Plus d’une fois j’ai ouvert des nouveaux chemins quand on me disait que ce n’était pas possible. Vous aussi, vous pouvez», termine Laurent Golay, non sans remercier celle qui a été fidèle depuis le début à ses côtés et sans laquelle il ne serait pas là aujourd’hui: son épouse Padou. Leçon de vie…
Deux frères, duo gagnant
Autre intervenant en position d’exemple ce soir-là aux Croisettes, le snowboarder lausannois Pat Burgener, qui s’est hissé en finale des Jeux Olympiques, cet hiver à PyeongChang, dans la discipline du halfpipe. Et de raconter son passé de cancre, lui qui ne voulait qu’une chose: pratiquer le snowboard, ses fugues et son passage à vide en atteignant la majorité, à cause de la bouteille. «Ma carrière a été relancée par mon frère Marc, qui terminait HEC et s’est mis à ma disposition» témoignage le snowboarder, également musicien, qui encourage lui les jeunes à vivre leur rêve, en se donnant les moyens. Ledit frère aîné, justement, reprend la parole en manager et parachève le propos en abordant franchement la question du bonheur: «Ce sont les gens autour de vous qui comptent, pas le fric. Pat et moi, on a eu l’occasion de voler en jet privé, c’est pas plus génial que ça et les propriétaires qui nous avaient invités n’étaient pas forcément les gens les plus heureux du monde.»
«On a bien connu le père…»
C’est le tour des popotes. Chaque municipal se présente, avec son dicastère. Gabriel Berciu, responsable des «travaux et infrastructure» au Lieu et par ailleurs président de la Société Electrique, y va de son couplet en encourageant lui aussi les nouveaux citoyens: «A votre âge, j’étais jeune réfugié en Suisse. Vous pouvez constater le chemin parcouru». Les «jeunes» sont à leur tour invités à se présenter, en ajoutant chacun leur passion… et le nom de leurs parents, afin que l’ancienne génération puisse les situer. Très à l’écoute des divers intervenants, ceux-ci se disent surtout heureux de retrouver d’anciens camarades de classe perdus de vue trois ans plus tôt! Dernier acte de cette soirée , Pat Burgener empoigne sa guitare et son harmonica pour interpréter en impromptu le classique Blowin’ in the Wind de Bob Dylan. «Combien de routes doit-on parcourir avant qu’on nous appelle un homme?». Une conclusion idéale pour cette soirée conviviale qui aura finalement plus ressemblé à un clan africain rassemblé sous l’arbre à palabre, qu’à une intronisation dans la vie civique et politique en bonne et due forme. Pourquoi pas, au fond? Chapeau aux organisateurs!



